Des bactéries « enrobées » pourraient-elles remplacer les engrais chimiques ?
Des bactéries « enrobées » pourraient-elles remplacer les engrais chimiques ?

Des bactéries spécialement enrobées pourraient permettre aux agriculteurs d’utiliser plus facilement les microbes comme engrais – l’encadré montre les éléments qui composent la coquille protectrice.
Les engrais chimiques conventionnels ne comptent pas parmi les substances les plus respectueuses de l’environnement. C’est l’une des raisons pour lesquelles certains agriculteurs envisagent d’utiliser des bactéries bénéfiques comme solution de remplacement. Une nouvelle technologie d’enrobage pourrait rendre ces microbes plus largement disponibles que jamais.
Non seulement les engrais chimiques traditionnels polluent l’environnement s’ils se retrouvent dans les cours d’eau, mais ils épuisent également les nutriments du sol au fil du temps. De plus, ils sont relativement coûteux.
À la recherche d’une alternative plus verte et plus durable, certains agriculteurs ont commencé à appliquer des bactéries fixatrices d’azote à leurs cultures. Ces microbes absorbent l’azote gazeux de l’atmosphère et le transforment en ammoniac dans le sol. Cet ammoniac fournit des nutriments aux plantes, restaure les sols épuisés et renforce les défenses naturelles des plantes contre les insectes nuisibles.
Les bactéries présentent toutefois un problème : elles sont très sensibles à la chaleur et à l’humidité excessives. Cela signifie qu’elles supportent mal d’être expédiées vers les exploitations agricoles à partir d’une source centrale. Il est possible de les cultiver dans les fermes dans de grands fermenteurs, mais la construction et l’entretien de ces fermenteurs peuvent s’avérer assez coûteux.
Compte tenu de ces inconvénients, le professeur adjoint Ariel Furst et ses collègues du MIT ont mis au point une méthode consistant à enrober les microbes dans de minuscules « réseaux métal-phénol » (MPN : Metal-Phenol Network). Bien que ces revêtements n’entravent pas la croissance ou les fonctions des bactéries, ils les protègent de la chaleur et de l’humidité. Les bactéries enrobées peuvent même être lyophilisées, puis expédiées et appliquées aux cultures sous forme de poudre.
L’équipe d’Ariel Furst a créé 12 MPN différents qui incorporent des métaux tels que le fer, le manganèse, l’aluminium et le zinc, tous considérés comme sûrs pour une utilisation en tant qu’additifs alimentaires. Les coquilles contenaient également des composés organiques appelés phénols, qui sont « généralement considérés comme sûrs » par la FDA.
Lorsque ces MPN ont été utilisés sur des bactéries Pseudomonas chlororaphis fixatrices d’azote, on a constaté que les 12 MPN protégeaient les microbes contre des températures allant jusqu’à 50 ºC et contre une humidité relative allant jusqu’à 48 %.
Le MPN le plus efficace était constitué d’une combinaison de manganèse et d’un polyphénol appelé gallate d’épigallocatéchine. Des P. chlororaphis enrobés de cette coquille ont été chauffés à 50 ºC, puis placés dans une boîte de laboratoire avec des graines de plantes cultivées telles que l’aneth, le maïs, les radis et le bok choy (variété de choux chinois). Dans tous les cas, le taux de germination des graines s’est amélioré de 150 % par rapport à l’ajout de bactéries fraîches non enrobées.
Ariel Furst commercialise actuellement cette technologie par l’intermédiaire d’une entreprise dérivée qu’elle a fondée et qui s’appelle Seia Bio.
« Lorsque nous pensons au développement d’une technologie, nous devons la concevoir intentionnellement pour qu’elle soit peu coûteuse et accessible, et c’est ce qu’est cette technologie », a-t-elle déclaré. « Elle contribuerait à démocratiser l’agriculture régénératrice. »
https://pubs.acs.org/doi/10.1021/jacsau.3c00426
https://news.mit.edu/2023/microbes-could-reduce-need-for-chemical-fertilizers-1115